Syrie: les déplacé·e·s des tremblements de terre face au manque d’accès à l’eau et à l’hygiène

Eau et assainissement MSF Nord-Ouest. Juin 2023, Syrie.

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Les tremblements de terre de février 2023 ont causé de nombreuses destructions dans la région enclavée du nord-ouest de la Syrie. Des dizaines de milliers de nouveaux·elles déplacé·e·s ont trouvé refuge dans des camps et vivent désormais dans des conditions précaires.

À Jandaris, une ville située dans le nord-ouest de la Syrie, à proximité de la frontière turque, les séismes ont gravement endommagé le système d'eau et d'assainissement de la ville, qui avait déjà été considérablement affaibli par plus de 12 ans de guerre.

« Nous avons tout perdu et la vie dans le camp est incroyablement difficile, explique Oum Hassan, qui habite le camp d’El-Eman à Jandaris. Nous avons à peine accès à l’eau potable, et les installations sanitaires sont défaillantes. Nos enfants tombent malades, ils attrapent le choléra, la gale ou la leishmaniose. Mes cinq enfants ont tous contracté cette maladie. Les cicatrices sur leur visage mettront des années à guérir. »

Dans ce camp, où les équipes MSF travaillent, la plupart des quelques 2 000 habitant·e·s ont tout perdu lors des séismes. Lorsqu’iels sont arrivé·e·s à El-Eman, iels ne disposaient que de neuf litres d'eau par jour alors que les normes internationales en prescrivent 20.

« Les infrastructures d'approvisionnement en eau et d'assainissement dans les camps de nouveaux déplacé·e·s sont très limitées, explique Halim Boubaker, coordinateur médical MSF pour la Syrie. Le manque d'eau potable et l'utilisation de sources d'eau contaminées augmentent le risque de maladies d'origine hydrique telles que le choléra et l'hépatite. Des latrines insuffisantes ou inadéquates compromettent l'hygiène et l'intimité et augmentent le risque de maladies transmissibles comme la gale »

Les conditions de vie déplorables dans ces camps ont créé un environnement propice à la transmission de la gale, une affection cutanée très contagieuse. MSF et ses partenaires, par le biais de cliniques mobiles et d'activités de santé communautaire, ont détecté une augmentation significative des cas dans le nord-ouest de la Syrie en mai. 

L’association Al-Ameen a ainsi recensé 3 600 cas de gale dans une dizaine de camps du secteur d’Afrin, qui accueillent quelque 13 000 personnes. Les équipes MSF ont analysé les causes principales de la propagation de la maladie, principalement liée aux égouts à ciel ouvert et à la pénurie d'eau persistante dans les camps touchés.

Les activités d'eau, d'assainissement et d'hygiène sont l'une des principales priorités de MSF, pour prévenir la propagation des maladies dans une centaine de camps de déplacés. Plus de 8 000 mètres cubes d’eau propre ont été distribués, 1 000 réservoirs d’eau et 130 latrines mobiles ont été installés. 111 000 articles de secours, dont des kits d'hygiène, des kits de cuisine et des kits menstruels pour les femmes, ont été donnés par MSF suite aux séismes.

Une lutte de longue date

La Syrie souffre aussi de plus en plus de la pénurie d'eau. Le pays s'appuie à la fois sur l'acheminement d'eau par camions, mené par des organisations humanitaires, et sur un réseau de conduites d'eau, entravé par une alimentation électrique instable et des coûts élevés du carburant.

En mai, les équipes de MSF ont mené des évaluations dans 48 camps de déplacés et deux villages situés dans le nord-ouest de la Syrie, abritant environ 60 000 personnes déplacées à l'intérieur du pays. 70 % des camps comptaient uniquement sur le transport d'eau par camion comme source d'eau potable. Alors que tous les camps disposaient de latrines, la moitié d'entre elles nécessitaient un entretien et 70 % des camps manquaient de douches. De plus, 85 % des camps ne disposaient pas de réseaux d'assainissement pleinement opérationnels.

« Depuis que nous nous sommes installés dans ce camp il y a cinq ans, nous n'avons jamais vraiment résolu le problème de l’accès à l’hygiène et aux latrines. Le terrain est rocheux et difficile à creuser, nous ne pouvions donc pas faire de toilettes appropriées. D’autre part, les familles ne peuvent se doucher qu'une fois tous les 10 jours. 

Manhal El-Freij, responsable d’un camp de personnes déplacées à Idlib