Coronavirus: un point sur la situation

Promotion de la santé à Hong Kong, 11.02.2020

Covid-1910 min

Plus de 100 pays ont désormais signalé des cas. Le 11 mars, l'OMS a qualifié le COVID-19 de «pandémie». La plupart des pays n'ont encore que des cas sporadiques ou des foyers définis. 90% des 118 000 cas sont signalés dans quatre pays: les cas en Chine sont désormais en baisse, mais il y a des flambées majeures en Italie, en Iran et en Corée du Sud. Dans d'autres pays, notamment en Europe, les chiffres augmentent de façon exponentielle.

Il s'agit d'un nouveau virus contagieux et beaucoup d’éléments restent encore à comprendre. Contrairement à la grippe, il n'y a pas de pré-immunité connue, pas de vaccin, pas de traitement spécifique et tout le monde peut être contaminé.

C’est une maladie respiratoire bénigne pour la grande majorité (estimée à 80% des cas confirmés) mais elle a un taux plus élevé de complications assez graves pour les personnes vulnérables (personnes âgées et personnes avec des comorbidités) que d'autres virus comme la grippe.

Selon les données actuelles (rapport de mission de l'OMS en Chine), 20% des cas confirmés seront graves et nécessiteront une hospitalisation afin d’assurer une surveillance continue et un traitement. 6% du total des cas confirmés nécessiteront une prise en charge en soins intensifs (environ 30% des personnes hospitalisées).

Le niveau élevé de soins de soutien et de soins intensifs requis a imposé un lourd fardeau à certains des systèmes hospitaliers les plus avancés du monde.

Des mesures publiques comme l'isolement, la quarantaine et la distance sociale sont généralement mises en place pour limiter une transmission communautaire incontrôlée, ralentir le nombre de cas et de patients gravement malades et protéger les plus vulnérables tout en gérant les ressources de santé collectives. Cependant, ces mesures ne devraient pas entraîner un risque accru de transmission au sein des foyers et en particulier pour les membres de la famille les plus vulnérables.

Ces données se basent sur l’existant et peuvent varier en fonction de chaque scénario. (Chaque pays a une politique de dépistage différente, de sorte que la proportion de cas confirmés avec complications variera aussi en fonction de la quantité de tests effectués pour les cas non compliqués, par exemple).

Où en sommes-nous ?

Cette épidémie, en termes d’ampleur, de propagation et de rapidité au niveau mondial a un impact énorme sur les systèmes de soins de santé dans les pays touchés.
D'après les expériences et sur la base des données connues à ce jour, un pourcentage important de personnes qui développent une forme grave de la maladie auront besoin d'une hospitalisation à long terme avec des soins très spécialisés (environ 20% du nombre confirmé de personnes infectées ont besoin en moyenne de 3 à 4 semaines de surveillance étroite avec un niveau élevé de soins, y compris une thérapie de soutien à l'oxygène, environ 6% des cas confirmés deviendront critiques et nécessiteront des soins intensifs spécialisés tels que des ventilateurs mécaniques pendant plusieurs semaines). (Remarque: les données proviennent du rapport de mission de l'OMS à Chine).

Hospitaliser autant de personnes pendant si longtemps à un niveau de soins aussi élevé représente un véritable défi, y compris pour les systèmes de santé les plus avancés. Nous sommes très préoccupés par les conséquences dans les pays où les systèmes de santé sont moins solides, et qui auront encore plus de difficultés s'ils doivent faire face à un grand nombre de patients atteints de COVID-19. Et nos connaissances sont limitées sur le virus: sa capacité de transmission dans les zones tropicales, la co-infection avec d'autres maladies comme le paludisme, la dengue, la tuberculose ou la rougeole… qui sont extrêmement répandues.

Que fait MSF ?

Projets MSF : MSF soutient les communautés les plus vulnérables grâce à ses programmes médicaux dans le monde entier. Chaque jour, nous traitons des centaines de milliers de patients atteints de diverses pathologies. Nous devons nous assurer que nous pouvons assurer la continuité des soins médicaux au sein de nos différents projets. Cela représente un défi au regard des actuelles restrictions en matière de voyages qui limitent la capacité de notre personnel à se déplacer dans différents pays. Une pression mondiale pèse également sur la production de certaines ressources médicales, en particulier les équipements de protection individuelle des professionnels de santé.

Les activités médicales se poursuivent dans nos projets, mais il est difficile de prévoir les capacités futures en approvisionnement de certains matériels essentiels, tels que les masques chirurgicaux, les compresses, les gants et les produits chimiques nécessaires au diagnostic du COVID-19.  Un risque de pénurie existe également en raison du manque de production de médicaments génériques et des difficultés d'importation de médicaments essentiels (par exemple les antibiotiques et les antirétroviraux) dues aux mesures de confinement, à la réduction de la production de produits de base, à l'arrêt des exportations ou à la réaffectation ou au stockage de médicaments et de matériel pour le COVID-19.

Préparation au COVID-19 : La protection des patients et du personnel de santé est essentielle, c'est pourquoi nos équipes médicales se préparent à d'éventuels cas de COVID-19 dans nos projets. Dans les endroits où le risque de cas est le plus élevé, cela signifie que nous devons nous assurer que des mesures de contrôle de l'infection sont en place, et mettre en place un système de dépistage au niveau du triage, des zones d'isolement et des actions de sensibilisation. Dans la plupart des pays où MSF intervient, nous travaillons en coordination avec l'OMS et les ministères de la santé pour voir comment MSF pourrait aider en cas de surcharge liée à des patients atteints du COVID-19 et nous dispensons des formations sur le contrôle des infections dans les établissements de santé.

Réponse à COVID-19 : Il est clair que le personnel de santé a besoin d'être soutenu et que les patients ont besoin de soins. L'ampleur de cette pandémie limite la capacité de MSF à apporter une réponse à grande échelle. En Italie, désormais le deuxième pays le plus touché après la Chine, MSF a commencé cette semaine des activités de soutien au contrôle de l'infection et aux soins aux patients dans quatre hôpitaux situés à l'épicentre de l'épidémie. À Hong Kong, notre activité d'éducation sanitaire et de soutien à la santé mentale se poursuit pour les groupes vulnérables. En Iran, MSF a soumis une proposition aux autorités pour contribuer à la prise en charge des patients atteints de COVID-19. La possibilité de faire des offres similaires à d'autres pays dépendra de la nature de l'épidémie, mais aussi de notre capacité à nous déployer.

Quelles sont les principales préoccupations de MSF ?

MSF est extrêmement préoccupée par la manière dont le COVID-19 pourrait affecter les populations vivant dans des environnements précaires tels que les sans-abri, les personnes vivant dans des camps de réfugiés en Grèce ou au Bangladesh, ou les populations touchées par les conflits au Yémen ou en Syrie. Ces personnes vivent dans des conditions difficiles, souvent peu hygiéniques et leur accès aux soins de santé est déjà gravement compromis. Elles peuvent avoir plus de difficultés à mettre en œuvre les mesures préventives et se heurter à des obstacles pour accéder aux soins de santé.

Il est essentiel d'informer les gens des mesures de protection à prendre et du fait qu'ils ont les moyens de se protéger (lavage des mains et auto-isolement en cas de contact à haut risque avec des patients COVID-19). D'une manière générale, nous sommes très inquiets de la manière dont les épidémies de COVID-19 affecteront les pays dont les systèmes de santé sont déjà fragiles, comme la RCA ou le Yémen. Dans de nombreuses régions où nous travaillons, il y a peu d'acteurs médicaux en mesure de répondre à une surcharge de patients. Nous voulons nous assurer que nous pouvons continuer à prendre en charge tous les patients là où nous travaillons aujourd'hui, tout en ayant des équipes médicales préparées à gérer des cas potentiels de COVID-19.

Il est clair que nous devons tout faire pour prévenir et retarder la propagation du virus. Il met déjà à rude épreuve certains des systèmes de santé les plus avancés du monde. Il est primordial de préserver l'accès aux soins de santé, tant pour les patients atteints de COVID-19 que pour tout autre patient. Cela signifie qu'il faut veiller à ce que les hôpitaux ne soient pas débordés et que le personnel de santé puisse faire face au nombre de patients nécessitant des soins intensifs et continuer à fournir des traitements à d'autres patients qui en ont également besoin.

Les infections du personnel de santé sont probables dans des structures submergées par un grand nombre de patients, devant faire face à un approvisionnement limité en équipements de protection individuelle pour le personnel et à une potentielle réduction des effectifs (car le personnel de santé fera également partie des cas confirmés par transmission dans la communauté). Plus le personnel de santé sera infecté, plus la capacité d'admission et de traitement des patients sera réduite. La sécurité du personnel de santé doit être une priorité absolue dans tous les établissements de soins.

Nous savons par expérience que la confiance dans la réponse et dans les autorités sanitaires est un élément essentiel pour le contrôle des épidémies. Une communication et des conseils clairs, opportuns, mesurés et honnêtes sont nécessaires. Il faut donner aux gens les moyens de se protéger.

Afin de garantir que les outils médicaux nécessaires de toute urgence pour répondre au COVID-19 sont accessibles, abordables et disponibles, les acteurs concernés, notamment les gouvernements, les sociétés pharmaceutiques et autres organismes de recherche qui travaillent au développement de traitements, de diagnostics et de vaccins, devraient prendre les mesures nécessaires pour :

  • empêcher les brevets et les monopoles de limiter la production et l'accès à un prix abordable ;
  • garantir l'accès à des médicaments existants, et qui pourraient être utilisés pour traiter le coronavirus, pour les patients souffrant des maladies pour lesquelles ils ont été conçus, afin d’assurer la continuité des soins ;
  • donner la priorité à la disponibilité des outils médicaux pour la protection et le traitement des travailleurs de santé de première ligne ;  
  • améliorer la transparence et la coordination, en veillant à mettre en place une approche fondée sur des données solides, pour surveiller en permanence le risque de vulnérabilité potentielle de la chaîne d'approvisionnement en outils médicaux essentiels, et pour adapter les mesures d'atténuation, le cas échéant,  grâce à une collaboration internationale.