Soudan du Sud : les inondations provoquent des déplacements massifs et aggravent la crise humanitaire

 Bahr ez Zeraf Old Fangak. Juin 2022, Soudan du Sud.

Soudan du Sud5 min

Si de nombreux pays d’Afrique de l’Est font face aux pires sécheresses des quarante dernières années, au Soudan du Sud la réalité est tout autre. En effet, le pays est saturé par quatre années consécutives d’intenses inondations. Plus d’un million de personne ont été touchées et environ deux tiers du pays est sous l’eau.

Les inondations saisonnières du Nil et de ses affluents sont habituelles. Cependant, celles des dernières années sont sans précédent. Les habitants racontent notamment que la saison des pluies commence plus tôt et dure plus longtemps. Aussi, l'intensité des précipitations est nettement plus élevée que par le passé. Depuis 2019, les niveaux d’eau ont été tels que le sol ne parvient pas à l’absorber totalement pendant les saisons sèches intermédiaires, accélérant l’apparition des inondations lors des pluies suivantes et aggravant chaque année la crise dans le pays.


Des dommages importants malgré les barricades des populations

Les communautés se préparent à la saison des pluies en construisant des digues prenant la forme de murs faits de terre pour retenir l’eau. Mais cette année, ces préparatifs n'ont pas été suffisants face au déluge. En octobre dernier, par exemple, les digues se sont rompues en raison des fortes pluies, submergeant des villages entiers dans le comté d’Ulang. Des écoles, de nombreuses maisons et des structures de santé ont été inondées.

« L'eau est arrivée dans la matinée. Tout le monde s’est précipité pour ajouter de la boue sur la digue. Nous avons œuvré toute la journée et même toute la nuit, mais le lendemain matin nous ne contrôlions plus rien. Nous avons alors simplement couru pour sauver nos vies, témoigne Nyanyieth Bang, qui vivait à Doma, dans le comté d’Ulang. Les inondations ont déplacé tout le monde. Elles ont submergé tous les villages, et le bétail s'est noyé lui aussi. Notre maison s'est effondrée. »

C’est une énorme catastrophe.


Des services de santé restreint et une explosion des cas de paludisme

« Les inondations ont un impact sur notre capacité à fournir de l'aide et à atteindre les communautés dans le besoin. De nombreuses routes qui traversent le pays sont devenues impraticables par les inondations. Dans un certain nombre d'endroits où MSF opère, nos avions n'ont pas pu atterrir en raison de l’eau sur les pistes d'atterrissage », déclare Aline Serin, chef de mission MSF au Soudan du Sud.

Depuis le début de l’année 2022 :  

  • 81 104 patients atteints de paludisme traités   
  • Plus de 4 200 enfants malnutris traités dans l'ensemble de nos structures médicales

 

Carte Réponse MSF Soudan du Sud

Une situation humanitaire critique

Les inondations ont déplacé des centaines de milliers de personnes, tué des millions d'animaux et détruit des milliers d'hectares de cultures, renforçant l’insécurité alimentaire dans le pays. Le Programme alimentaire mondial des Nations unies estime que plus de 75 % de la population du Soudan du Sud a besoin d'une aide alimentaire. Les équipes MSF sont témoins d'une augmentation inquiétante des taux de malnutrition aiguë modérée à sévère.

N'ayant nulle part où aller, des dizaines de milliers de personnes ont fini par s’installer dans des camps de personnes déplacées. Le manque d'abris, d'eau potable et d'installations sanitaires dans ces camps cause des épidémies de maladies infectieuses et hydriques et exposent les familles déplacées à d'autres risques sanitaires. En résulte une catastrophe humanitaire, pour une population qui en subit déjà beaucoup trop.

Malgré l'urgence et l'augmentation des besoins humanitaires au Soudan du Sud, l’aide internationale s’est quant à elle réduite.  Cela se traduit par une réponse apportée aux populations qui diminue et elles manquent de ressources et ont peu de résilience après avoir subi des chocs consécutifs et multiples. La réponse actuelle à la dévastation causée par les inondations est loin d'être satisfaisante. Les organisations humanitaires, les agences des Nations unies et les gouvernements doivent redoubler d'efforts pour faire face à l'ampleur de la crise et aux besoins considérables en matière de nourriture, d'abris, de soins médicaux.