Liban: les réfugié·e·s syrien·ne·s peinent à accéder aux soins de santé par crainte d'être expulsé·e·s

Campement informel Arsal Liban

Liban5 min

Les personnes réfugiées de nationalité syriennes au Liban rencontrent de plus en plus de difficulté pour accéder aux services médicaux vitaux en raison de restriction de leur liberté de mouvement et de cas de déportations forcées. Des patient·e·s ont reporté aux équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) et leurs partenaires que la situation est exacerbée par l’intensification des discours discriminatoires, créant des inquiétudes pour leur sécurité et installant un climat de peur.

Dans ce climat d'intimidation, de nombreux·euses réfugié·e·s ont peur de quitter leur maison, même pour aller chercher des soins médicaux essentiels. La situation est particulièrement alarmante à Arsal, ville isolée au nord du Liban près de la frontière syrienne, où les équipes de MSF travaillent depuis plus de 10 ans.

Restrictions, humiliations et déportations

« Tout le monde est nerveux et reste à la maison, paralysé par la peur, explique Farhat, 75 ans, un réfugié syrien qui reçoit un traitement contre le diabète à la clinique MSF d'Arsal depuis neuf ans. Personne n'a le courage de sortir, même pour acheter des produits de première nécessité. Il craint d'être arrêté par les autorités et expulsé du Liban. J'ai peur qu'ils m'emmènent, qu'ils m'humilient et qu'ils m'expulsent du pays par la force », dit-il, ajoutant que beaucoup d'autres personnes partagent ses inquiétudes.

Au cours des deux dernières semaines, les équipes de MSF ont constaté un nombre croissant de rendez-vous manqués dans leurs cliniques, en raison de la crainte des patient·e·s d'être expulsé·e·s alors qu'ils traversent les points de contrôle pour se rendre dans les centres de santé.

Les équipes de MSF rapportent également que le climat de peur a un impact sur leur capacité à référer les cas urgents vers les hôpitaux. « Nous avons eu un patient qui, bien que nécessitant des soins médicaux urgents, a refusé d'être référé à un hôpital par peur d’être expulsé, sachant qu'il n'était pas enregistré », explique Dr Marcelo Fernandez, chef de mission MSF au Liban.

Confiscation des voitures et motos, mobilité réduite pour nos patient·e·s

Les récents renforcements des politiques et des restrictions à l’encontre des réfugiés syriens au Liban ont entraîné la confiscation de voitures et de motos. Souvent, ces véhicules étaient leur seul moyen de transport abordable alors que la crise économique a fait grimper en flèche le coût des taxis et des transports publics. « J'avais l'habitude d'utiliser ma moto pour me rendre à la clinique, explique-t-il, mais la récente réglementation nous interdit d'utiliser des motos, alors je dois maintenant faire le trajet à pied. » raconte Mahmoud, 56 ans, patient recevant un traitement pour le diabète à la clinique MSF d'Arsal, à 5 km de chez lui.

De nombreux·euses habitant·e·s d'Arsal vivent dans la pauvreté, tandis que les services et les infrastructures de la région sont limités. Les résident·e·s libanais·e·s et les réfugié·e·s sont confronté·e·s à des difficultés significatives pour accéder aux services essentiels, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la ville.

« La confiscation des véhicules a privé de nombreuses personnes vulnérables d'un moyen de transport fiable, explique le Dr Marcelo Fernandez. Cette mesure a intensifié les difficultés rencontrées par des personnes dont les ressources et la liberté de mouvement sont déjà limitées, entravant encore davantage leur accès aux soins médicaux essentiels. 

Cette situation est intenable. Aucune action ne doit se faire au détriment de la santé des gens.

Toutes les personnes vulnérables doivent avoir accès à des soins de santé en temps voulu, de manière égale, quels que soient leurs antécédents ou leur statut. »


* Les noms des patient·e·s ont été modifiés pour protéger leur identité.

A propos de MSF au Liban

MSF est une organisation médicale humanitaire internationale indépendante qui fournit des soins de santé gratuits aux personnes dans le besoin, sans discrimination. MSF a commencé à travailler au Liban en 1976 et ses équipes travaillent dans le pays sans interruption depuis 2008.

Les équipes de MSF travaillent actuellement dans sept localités à travers le Liban, fournissant des soins médicaux gratuits aux communautés vulnérables, y compris les citoyens libanais, les réfugiés et les travailleurs migrants. Les services de MSF comprennent la santé mentale, la santé sexuelle et reproductive, les soins pédiatriques, les vaccinations et le traitement des maladies non transmissibles telles que le diabète. Avec plus de 700 employés au Liban, les équipes de MSF assurent environ 150 000 consultations médicales par an.