Cameroun: une semaine pour mieux faire connaître l’ulcère de Buruli

La maladie frappe les hommes et les femmes de tous âges, mais la plupart des patients sont âgés de moins de 15 ans.

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A Akonolinga, dans le centre du Cameroun, MSF développe depuis dix ans le traitement de l’ulcère de Buruli, une maladie méconnue.

Un spot et une émission radio à l’échelle nationale, une rencontre avec les journalistes, une autre avec les étudiants en médecine… Médecins Sans Frontières (MSF) vient de lancer au Cameroun une semaine de sensibilisation autour d’une maladie méconnue: l’ulcère de Buruli.
L'ulcère de Buruli fait partie des maladies dites tropicales négligées. C’est une infection chronique de la peau causée par une mycobactérie (Mycobacterium ulcerans). Elle peut conduire à une destruction massive des tissus, à de larges plaies très difficiles à cicatriser et pouvant créer de graves incapacités physiques surtout au niveau des bras et des jambes.
«L’objectif de cette campagne est d’attirer l’attention sur les modes de détection et de traitement de la maladie. Nous voulons aussi lutter contre la discrimination dont souffrent les malades», explique le Dr Mitima Djuma, le chef de la mission MSF.
En collaboration avec le ministère de la Santé publique camerounais, MSF diagnostique et traite l'ulcère de Buruli depuis 2002. À ce jour, plus de 1100 patients ont été traités dans la ville et le district d’Akonolinga, où MSF a construit un pavillon spécialisé dans l’enceinte de l’hôpital. Depuis dix ans, l’organisation humanitaire a beaucoup développé le traitement contre la maladie.

Une maladie impressionnante mais qui peut être soignée

Similaire à la lèpre, la maladie est très impressionnante, et peut être mortelle. Au Cameroun, elle est vue comme une malédiction et les malades sont rejetés. Des fantasmes renforcés par le fait que les connaissances sur l’ulcère de Buruli sont limitées. Les communautés vivant le long des plans d'eau à faible courant, comme les étangs, les marécages et les lacs sont les plus affectées. Aussi, on pense que la mycobactérie est transmise par une puce d’eau mais il n’y a aucune certitude.
L’évolution de la bactérie dans l’organisme reste aussi mal connue. Un patient peut, par exemple, avoir une plaie qui réapparaît ensuite dans un autre endroit du corps. La maladie frappe les hommes et les femmes de tous âges, mais la plupart des patients sont âgés de moins de 15 ans. Les communautés rurales pauvres sont les plus touchées, ce qui explique aussi le manque d’attention et de recherche médicale.
«Certes, l’ulcère de Buruli touche relativement peu de personnes et les soigner ne fait pas reculer la maladie, car la mycobactérie se trouve dans la nature et il n’y a pas de transmission interhumaine. Mais nous avons la responsabilité de nous occuper de ces malades complètement négligés», plaide le Dr. Djuma.
En plus de prendre en charge une centaine de patients par année, MSF a fait progresser le diagnostic et le traitement. Tout l’enjeu est maintenant d’inciter les Camerounais à consulter le plus tôt possible avant que leurs plaies s’aggravent et nécessitent une longue hospitalisation voire une importante intervention chirurgicale. En raison des croyances autour de l’ulcère de Buruli, les malades arrivent tardivement au pavillon d’Akonolinga. MSF a introduit et testé des pansements modernes qui améliorent la cicatrisation. Un antibiotique oral a également été introduit, remplaçant les injections.

Echanges avec la Suisse

Autre avancée, MSF a contribué à mettre en lumière le lien entre le VIH/sida et l’ulcère de Buruli en collaboration avec les Hôpitaux universitaires de Genève. La prévalence du VIH au sein de la population adulte affectée par l’ulcère de Buruli est cinq à six fois plus élevée que la prévalence nationale du Cameroun. Les patients co-infectés présentent aussi des plaies plus graves, avec davantage de risques de récidive. En conséquence, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) recommande désormais de dépister le VIH chez tous les malades atteints par l’ulcère de Buruli et de les mettre sous traitement antirétroviral si nécessaire.
Enfin, des spécialistes suisses en dermatologie ou dans le traitement des plaies se rendent régulièrement à Akonolinga. Une équipe composée d’un chirurgien, d’une infirmière et d’une anesthésiste est actuellement sur place pour opérer les patients qui en ont besoin.
A l’avenir, l’idée est que la prise en charge de l'ulcère de Buruli et des plaies chroniques fasse partie de la formation médicale au Cameroun. Cette semaine, MSF sensibilisera donc aussi les étudiants et médecins camerounais à Yaoundé à propos de cette maladie encore trop peu connue dans la capitale.

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