Camp de Dadaab: la situation humanitaire continue de se détériorer

Camp Dagahaley, Januar 2022

Kenya5 min

Les hospitalisations d'enfants souffrant de malnutrition sévère ont fortement augmenté à Dagahaley, l'un des trois camps de réfugiés du complexe de Dadaab, au Kenya, alors que les conditions humanitaires se dégradent dans les camps surpeuplés, indique Médecins Sans Frontières (MSF).

En 2022, MSF a traité 12 007 patients - dont un nombre considérable d'enfants - dans son unité pédiatrique et centre nutritionnel thérapeutique hospitalier de Dagahaley. Ce chiffre correspond à une augmentation de 33% par rapport à l'année précédente. Parallèlement à cette croissance, les données de MSF datant de décembre 2022 montrent une tendance à l'augmentation progressive du taux de malnutrition aiguë globale, qui a atteint 8% lors du dépistage de la mesure du périmètre brachial (par un bracelet MUAC). C’est presque un enfant sur 10 qui est atteint de malnutrition aiguë, soit une augmentation de 45% par rapport au dépistage précédent, effectué en juillet 2022.

Plusieurs facteurs complexes aggravent la situation humanitaire à Dagahaley et mettent à rude épreuve les capacités du camp en matière de soins de santé.

Une épidémie de choléra, déclarée fin octobre 2022, a frappé les camps de réfugiés ainsi que les communautés des comtés de Garissa et de Wajir. Une sécheresse accablante et un conflit prolongé continuent de déplacer les populations de la Corne de l'Afrique à la recherche de nourriture et d'eau. L'insuffisance de la réponse humanitaire, due à la rareté des fonds, ajoute une pression supplémentaire, ce qui accentue les lacunes à grande échelle dans des secteurs tels que l'eau, l'assainissement et l'hygiène, la nutrition, la santé et la sécurité.

Cette année, les perspectives pour les réfugiés sont bien sombres. Le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA, déc. 2022) prévoit, pour la sixième saison consécutive, des pluies limitées ou absentes, de mars à mai 2023, ce qui exacerbera l'ampleur et la gravité de l'urgence humanitaire dans la Corne de l'Afrique. Les acteurs humanitaires s'inquiètent des diminutions de financements, qui obligeraient les réfugiés à réduire davantage leurs activités à un moment où les besoins augmentent rapidement.

MSF, en coordination avec la communauté locale et les acteurs humanitaires, a intensifié son soutien d'urgence au-delà des soins de santé complets dans le camp de Dagahaley. MSF a ouvert deux postes médicaux avancés, construit 50 latrines, mis en place deux réservoirs d'eau et distribué des bâches en plastique et des matelas à quelque 800 familles nouvellement arrivées résidant à la périphérie du camp. Malgré les efforts de l’organisation pour cibler les réfugiés les plus vulnérables vivant aux alentours de Dagahaley, la crise humanitaire actuelle à Dadaab nécessite une réponse à grande échelle de toute urgence pour éviter une nouvelle détérioration de la situation.

MSF appelle les bailleurs de fonds à débloquer rapidement une aide financière, indispensable pour répondre aux besoins croissants d'assistance et de protection. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a lancé des appels aux donateurs afin de mobiliser des ressources pour la réouverture du site IFO 2, initialement fermé en 2018. L’objectif est d'accueillir jusqu'à 80 000 réfugiés d‘autres camps encombrés, en prévision de la saison sèche qui approche, et de l’arrivées de davantage personnes à Dadaab. A moins que des fonds ne soient levés et qu'une action concrète ne suive, l'afflux de nouveaux réfugiés peut faire basculer la crise au-delà des capacités de réponse des organisations humanitaires, avec les ressources actuellement disponibles.

Les réfugiés de Dadaab sont piégés dans une crise qui dure depuis 30 ans. Même si la priorité immédiate est de répondre aux besoins croissants dans les camps, il est tout aussi essentiel de mettre en œuvre des solutions durables pour les réfugiés. Ces solutions sont inscrites dans le cadre juridique kenyan, notamment la loi sur les réfugiés de 2022, mais dont l’application à Dadaab a pris du retard.

Dadaab accueille actuellement plus de 233 000 réfugiés enregistrés, dont beaucoup vivent dans les camps depuis plus de trois décennies (HCR, juillet 2022) et plus de 80 000 réfugiés non enregistrés. Rien qu'en 2022, plus de 50 000 personnes sont arrivées à Dadaab, sans être encore officiellement enregistrées comme réfugiés.

MSF a fourni des soins de santé à Dadaab et dans ses environs pendant la majeure partie des 30 années d'existence du camp. Nos programmes actuels se concentrent sur le camp de Dagahaley, où nous fournissons des soins de santé complets aux réfugiés et aux communautés d'accueil, y compris des soins de base et spécialisés dans deux postes de santé et un hôpital de 92 lits. Nos services médicaux comprennent une prise en charge en santé sexuelle et reproductive, y compris en obstétrique d'urgence, en santé mentale, l'assistance médicale et psychologique de personnes victimes et survivantes de violences sexuelles et sexistes, les soins à domicile palliatifs et pour les patientes et patients souffrant de diabète.