S’il te plait, dessine-moi une alternative…

Maputo, Mozambique, 01.08.2009

5 min

Malade du VIH/sida, José J.M. espère que de nouveaux médicaments soient enregistrés et disponibles au Mozambique afin de rester en vie.

“Boa tarde” dit José J.M. en entrant dans la salle de consultation. Avant de s’asseoir, cet homme de 50 ans très longiligne enlève sa casquette « Nike » et pose sa canne. Il raconte son histoire en portugais, la langue nationale du Mozambique.
Avec sa femme Luisa, ils ont deux enfants. Il y a six ans, José a été très malade. « J’avais des diarrhées, des problèmes d’estomac et de digestion. Je me sentais très fatigué. J’allais tellement mal que j’ai été hospitalisé. Je m’en souviens ! C’était en 2003 » C’est à cette époque qu’il se fait dépister et que sa vie bascule. Il a le sida à un stade déjà avancé et doit commencer un traitement antirétroviral (ARV). 

Un espoir nécessaire mais difficile à garder

« Depuis 4 mois, je suis en traitement de deuxième ligne. J’ai fait une prise de sang il y a 2 semaines, mais mes CD4 (1) sont encore très bas. Je ne comprends pas pourquoi la maladie évolue. Je prends mes médicaments tous les jours, à la même heure, je les digère bien, j’ai une vie saine. Je suis surpris de passer en deuxième ligne aujourd’hui. Cela me fait peur. Car après, il n’y aura plus d’alternative. C’est ma dernière chance. Si mon système immunitaire ne va pas mieux avec ce deuxième traitement, alors la maladie risque d’avoir raison de moi. »
José J.M. est très conscient de l’évolution de sa maladie, ses risques, ses obligations. Si les traitements ont considérablement augmenté l’espérance de vie des personnes touchées, il ne faut pas oublier que le prix à payer pour cela est important et que dans la lutte contre le virus, le patient n’a le droit à aucun répit. Des conseillers aident José à relativiser et à garder espoir.
« Cela m’apporte un réel soutien car ils me poussent à être courageux, à continuer à prendre régulièrement mon traitement. Ils me rappellent que je dois utiliser un préservatif. Avec eux, je suis en vie, ils me parlent de vivre longtemps, encore. Je dois continuer à être fort et à espérer. Mon rêve est de rester là pour offrir une bonne éducation à mon fils Noé, et lui construire une maison. Alors, je prie Dieu pour qu’il protège ma santé et que d’autres traitements arrivent enfin dans le pays »

Prendre ses médicaments tous les jours, toute sa vie

L’efficacité d’un traitement antirétroviral (ARV) est directement liée à l’adhérence, c’est à dire à la capacité d’une personne à prendre un traitement conformément à une prescription. Mais, au Mozambique, certains patients n’ont pas accès au traitement, vivant loin des structures de santé compétentes. D’autres fois, la structure elle-même est en rupture de stock, empêchant les patients de prendre leurs traitements. Pour d’autres malades, la prise irrégulière, voire l’arrêt des ARV est dû aux effets indésirables de ces derniers, basés sur des molécules qui ont une toxicité élevée.
La gestion sans faille des prises de médicaments, pas toujours compatible avec la vie sociale de la personne touchée, est pourtant un enjeu majeur pour le patient lui-même mais aussi pour l’ensemble de la population mozambicaine afin d’éviter le développement d’un « super virus », qui résiste aux médicaments. Le traitement VIH/sida impose aux personnes traitées un combat quotidien dans la gestion des prises de médicaments et des effets secondaires. Et cela, à vie.

Le virus du VIH/sida mute facilement

« Lorsque des résistances se développent, les médicaments sont alors moins efficaces et le malade se retrouve en situation d’échec thérapeutique. Sa charge virale augmente et son système immunitaire se détériore à nouveau. Il est donc nécessaire pour lui de modifier son traitement. » explique Agnès, médecin coordinateur à Maputo. On dit qu’il passe d’un traitement de première ligne d’antirétroviraux à celui de seconde ligne : il faut trouver d’autres combinaisons thérapeutiques efficaces pour lutter contre le virus. Plus il y a de résistances, plus la maladie est difficile à soigner et plus le traitement est toxique. « La première fois que j’ai pris les médicaments de 2ème ligne, j’ai eu l’impression d’être saoul toute la journée. Aujourd’hui, cela m’est passé fort heureusement. Par contre, des taches sont apparues sur ma peau, mes mains et mon visage. » raconte José.
Plusieurs alternatives de deuxième ligne sont disponibles lorsqu’un patient est en situation d’échec thérapeutique, mais aucun ARV de 3ème ligne n’est encore arrivé dans le pays. Pourtant, « quelques patients sous traitement de deuxième ligne ARV présentent déjà des signes d’échec thérapeutique, et auraient besoin de médicaments de troisième ligne. Mais, au Mozambique, on n’en parle pas. Il n’y en a pas, donc que voulez-vous qu’on dise aux patients ? Qu’ils vont mourir à cause de médicaments trop onéreux et non enregistrés dans le pays ? On essaye de garder espoir, on leur dit qu’ils doivent aussi garder espoir : continuer à prendre régulièrement leur traitement pour pouvoir vivre, encore et encore, au cas où les 3ème lignes arrivent jusqu’ici. » explique Aida, psychologue à l’hôpital de jour de Alto Maé à Maputo, la capitale du pays.

(1) Un lymphocyte CD4 est un type de globule blanc qui aide à diriger et active les cellules de l'organisme qui combattent l'infection. Ils doivent leur nom aux molécules CD4 qu'ils portent sur leur surface. Ces cellules sont également appelées lymphocytes T helper. Ces lymphocytes sont la cible de l’infection à VIH et leur chute entraîne le sida. 

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